lundi 10 mars 2008

Sony, la mascotte du Dr Alphonse

Sony arrive avec son oncle et sa tante juchés sur leur moto dans les poussières soulevées par le départ du «grand sumo». C’est une surprise. Il y a 10 jours que nous essayons de le joindre par sa tante sans succès. Elle n’était pas à l’hôpital où elle travaille. Elle était dans le sud et est revenue ce matin.
Sony n’est pas dans notre liste, mais il revêt pour le Dr Alphonse Pluquailec, le fondateur de Santé France Laos, un intérêt tout particulier. Il est le premier petit laotien à avoir été opéré, il y a 9 ans déjà.
Le 13 juin, le «Dr Alphonse» fêtera à Arles les 10 ans de l’association Santé France Laos avec une exposition de photos, celles de photographes venus visiter les enfants du Laos au cours de cette période. Il y aura, entre autres, celles de Marie Babey venue au Laos en mai 2001, et le reportage que JF Mousseau va faire sur Sony.
Sony, le premier opéré du Laos est devenu la mascotte d’Alphonse Pluquailec. Il est le symbole de la réussite de cette «entreprise» à laquelle il a consacré son énergie sans compter depuis une décennie (consultations, formations, envois de matériel, etc…).
Sony, qui a aujourd’hui 13 ans, a été opéré à l’âge de 3 ans. Il a été accueilli par la famille Borniche qui est toujours en contact avec lui. Sony est un excellent élève de CM2 bilingue lao-français, dans la même école que Boumni et Phounchab que nous avons rencontrées il y a 2 jours. Il est un peu jaloux de ses copines qui ont eu la vedette dans leurs classes respectives… Pourquoi ne sommes-nous pas venus le voir dans la sienne ?… Bien sûr, nous étions ignorants de cette proximité… Demain nous retournerons à l’école, dans sa classe, et tout rentrera dans l’ordre !
Le destin de Sony n’est pas un long fleuve tranquille. Dès sa naissance, Sony avait tous les symptômes d’une malformation cardiaque (lèvres bleues, respiration difficile). Sur les conseils d’une de ses tantes médecin et employée au laboratoire de l’hôpital de Vientiane, ses parents le font examiner dans l’hôpital thaïlandais qui se trouve sur l’autre rive du Mékong. Le diagnostic tombe : CIV. Mais les 4 jours passés en examens et consultations diverses ont très vite épuisé leurs ressources. Ils rentrent à Vientiane sachant que, pour vivre Sony devra être opéré très vite. Pourtant, plus de 2 ans passent. Nous sommes en décembre 1998. La tante de Sony voit arriver dans son laboratoire un enfant et demande à sa maman les raisons de l’analyse prescrite… Mon enfant a une malformation cardiaque et doit partir se faire opérer à Paris. …Qui avez-vous rencontré à l’hôpital ?… Le Dr Khantavy et le Dr Pluquailec ! La tante de Sony prend immédiatement contact avec sa collègue, le Dr Khantavy qu’elle connaît et qui la met aussitôt en rapport avec le «Dr Alphonse». Il finit ses consultations dans une heure et doit courir prendre son avion. Il ne reviendra que dans 4 mois. C’est trop long. Sony ne va pas bien, de moins en moins bien ; chaque mois il doit faire un séjour en réanimation. Il ne grandit pas. Entre temps, ses parents se sont séparés, son oncle et sa tante l’ont quasiment adopté. Une heure passe et Sony est déjà là dans les bras de sa tante quand le dernier petit patient sort du cabinet du «Dr Alphonse»... Bon venez vite, je l’examine (électrocardiogramme, échographie, auscultation …)… Il faut qu’il parte à Paris très vite … Mais ? … Ou vous vous séparez de Sony pendant 2 mois, ou vous prenez le risque de vous séparer de lui pour la vie ! La tante dit oui. Le dossier sera bouclé dans le mois qui suit et Sony sera opéré en février 1999 à Laennec.
Sony sera le premier d’une longe liste d’enfants laotiens envoyés en France (140 à ce jour) par France Santé Laos. A l’époque, pas d’email, pas de permanence de l’association SFL à Vientiane (pas de Marie !), pas de relais de l’information… La tante s’inquiète jusqu’au retour de Sony, qui revient transformé.
Aujourd’hui, Sony est un garçon à la personnalité très attachante : il y a dans son regard la gravité des enfants confrontés trop tôt à la nécessité de se prendre en charge, mais aussi l’éclair de celui qui est heureux d’avoir trouvé soutien, équilibre, confiance et affection auprès de son oncle et de sa tante.
Lui aussi a fait son choix. Il veut être médecin !

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