lundi 25 février 2008

Kingkéo, le petit guerrier

Vendredi au petit matin, nous avons quitté Vangvien et sa douceur, pas étonnant qu’en amont du fleuve Nam Song les petits « resorts » de paillotes soient devenus incontournables pour les « backpackers » (les routards) à la recherche de bonheurs … parfois artificiels !
La route est plus longue que prévue d’autant que nous avons dû porter assistance à un camion de ciment renversé dans le ravin … direction bloquée ? … Plus de peur que de mal.
Lorsque nous arrivons chez Kingkéo, il est 11h30 et le village est en fête. Aujourd’hui, c’est le Mâkha Bouça Day, la fête du 3e mois de pleine lune chez les bouddhistes. Au Laos, dans les villages, les occasions de distractions sont rares. Alors une fois par mois, il y a le prétexte d’une fête religieuse … ou politique !
La maman de Kingkéo, institutrice en CP, est en vacances scolaires jusqu’à lundi. De même pour Kingkéo qui est cette année en CE1. Il travaille bien, il est tonique et sans être bien gros, son surnom de Héo (le squelettique) n’évoque plus que le passé. Il a 7 ans maintenant et a été opéré il y a 2 ans. 1 semaine après sa naissance, ses problèmes sont apparus. Il a été soigné à l’ampicilline à l’hôpital du district où il a fait de nombreux séjours de longue durée qui ont épuisé les ressources de sa famille, jusqu’au jour où il fut dirigé sur l’hôpital Mahosot à Vientiane. Un mois après, il partait en France. De son séjour dans la famille Bettencourt, il se souvient de cette étrange machine qu’il fixait pendant des heures en la regardant tourner … une machine à laver ! Il faut dire que dans son village, qui n’est pas un des plus pauvres, la modernité c’est d’abord la télé, qu’on partage parfois à plusieurs maisons, et les haut-parleurs saturés qui « crachent » en boucle les tubes laotiens du moment !
Phet, la maman de Kingkéo, a accouché de ses 3 enfants (Kingkéo, sa sœur Singsing 10 ans et son grand frère Tia 15 ans) dans une petite maison de bambou (24m2) près de la rivière. A la mort de son père, il y a quelques années, Pet et sa famille ont déménagé dans cette maison, plus vaste, avec la deuxième femme de son père, sa belle-mère qui l’a élevée. C’est elle, au visage d’indienne d’Amérique, qui avant le déjeuner offert en notre honneur, va diriger la petite cérémonie du Baci. Difficile de savoir si ces cérémonies prennent place pour chasser nos démons ou nous protéger d’en avoir … sans doute les deux à la fois.
Kingkéo est un vrai petit garçon. Il l’affirme avec le fusil (en plastique !) qu’il arbore fièrement, et avec lequel il joue à la guerre … une guerre qu’il n’a pas connue et dont personne ne parle ici, même si encore aujourd’hui certaines zones sont interdites pour cause de bombes non encore désamorcées.
Après un déjeuner, où nous goûtons du cœur de cocotier (genre pousses de bambou), nous proposons à Kingkéo de troquer le viseur du fusil pour celui du petit appareil photo. Kingkéo disparaît pour une opération commando dans le village. Nous le retrouvons au moment du départ pour la traditionnelle photo de famille et celle du dessin qu’il a fait la veille à l’école avec ses copains. Echange d’armes. JFM récupère le petit appareil, Kingkéo son fusil. Il regarde l’heure de sa nouvelle montre et court vers la rivière avec sa bande, qui aurait pu inspirer la « Guerre des boutons » !


1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bravo pour vos témoignages ; textes émouvants et belles photos. Nous attendons avec impatience l’expo à Premier Regard. Dès maintenant, JFM fais-nous découvrir avec vous les paysages, les villages et l’environnement dans lesquels vivent les familles que vous rencontrez.
Bisous. Laurence F.