mercredi 27 février 2008

La Maison du Bonheur

L’orphelinat de Sœur Marie-Catherine à Vientiane

Nous sommes arrivés samedi soir à Vientiane… un peu épuisés par une nouvelle semaine de reportages dans la poussière des pistes de terre rouge.
Après le très froid ; le très chaud ! Difficile aussi d’imaginer la vie dans les campagnes, les pieds dans la boue au moment de la mousson.
Nous quittons à regret cette campagne où le moyen-âge côtoie les signatures de la modernité (paraboles TV, motoculteurs, motos, etc…). Ici, même au milieu de nulle part, le silence est rare : l’échappement du 2 temps Honda est généralement relayé par la télé à tue-tête !

Vientiane, c’est la capitale avec ses grands projets qui la façonne en ville moderne : des grands axes, des bâtiments administratifs imposants. Nous sommes au pays de la centralisation qui trouve ses relais au niveau du district (il y en a une quinzaine), puis du village (ils sont 10.000), puis du quartier.
Dimanche on fait relâche, mais nous avons quand même deux rendez-vous. L’un avec Marie de Santé France Laos, qui nous apporte un soutien précieux dans l’organisation de nos rendez-vous et de notre séjour en général ; l’autre avec une grande tante vietnamienne de JFM, la Sœur Marie-Catherine, dans le quartier du That Luang, la grande stupa sacrée, emblème du Laos !



Depuis 50 ans – elle a traversé tous les régimes – elle crée des orphelinats de jeunes filles au Laos. Cette tata en «cornette» de 77 ans a une énergie considérable et toujours des projets.
Son orphelinat de Vientiane créé il y a plus de 10 ans et qui accueille 40 jeunes filles, de la primaire à l’université, ne lui suffit pas… Alors, il y a maintenant la maison des sourds-muets à Luang Prabang que le Vatican aide à construire, et pour lequel elle forme 2 sœurs et 2 de ses pensionnaires, futures institutrices, au langage des sourds-muets.
Elle se plaint de l’inconfort des 7 heures de car à travers des routes vertigineuses qu’elle pratique une fois par mois pour visiter Luang Prabang… mais elle en rigole !


Ici, la règle est que chaque pensionnaire, quel que soit son âge, utilise son temps libre à travailler au potager, au verger, à la bananeraie. Et puis, il y a l’étable avec les vaches qui ont remplacé les poulets pour cause de grippe aviaire, et la porcherie. A l’orphelinat, on mange 1 cochon par mois, et 3 veaux par an ; une vie quasi en autarcie sur un terrain gagné sur les rizières (comblées par des camions de bonne terre il y a 8 ans) et maintenant encerclé par ce qui devient la banlieue sud, prochainement bouleversée par un projet de zone franche confié aux chinois, en échange d’un stadium pour les jeux pan-asiatiques de 2009. L’orphelinat pourrait bien y perdre sa bananeraie avec une indemnité compensatoire misérable… intérêt collectif oblige !


Mais la religieuse est philosophe. Elle qui en 1975, dans l’uniforme des Sœurs de la charité, s’est vue confier par le Parti la direction d’un quartier de Savannakhet, et l’animation de groupes de «formation» aux nouvelles règles morales et politiques de la Révolution !
A 19h00 la cloche sonne. Sœur Marie-Catherine nous invite à partager le dîner quotidien des autres sœurs (elles sont une douzaine, plutôt jeunes, deux sont très âgées).
Après le bénédicité, soupe de légumes frais du jardin, tranche de rôti de porc au riz vapeur, salade garantie rincée à l’eau minérale, banane du jardin, verre de lait de soja fabrication maison… un régal !


Notre conversation se poursuit pendant la prière du soir des enfants. Leurs chants résonnent depuis la chapelle qui ressemble à la maison du bonheur… par contraste avec ces villages dont elle nous parle. Car Sœur Marie-Catherine évoque un Laos que nous ne connaissions pas : celui des villages des minorités, distants de 200km, dans l’Est, par des pistes difficiles. Des villages sans hygiène et pratiquement sans école. Elle nourrit le secret espoir de pouvoir y envoyer l’une de ses protégées devenue institutrice. Elle ferait non seulement la classe aux enfants, mais aussi aux parents. L’enseignement de l’hygiène est prioritaire pour faire reculer la pauvreté. Mais il faudrait la payer correctement et régulièrement. Là est le problème (l’orphelinat vit sur un budget fait de dons jamais suffisants). Dans ces villages, l’instituteur est payer 30$ par mois, et pas toujours… alors il n’est pas souvent là car il doit partir cueillir ou chasser pour sa survie !
Il est 21h00 déjà. Les enfants sont assis devant la télévision dans le réfectoire (c’est l’un des deux soirs autorisés avec le samedi). Sœur Jeanne est désignée pour nous reconduire, accompagnée de Sœur Marie-Catherine qui ne conduit plus la nuit. Cela ne l’empêche pas chaque mois de prendre son 4x4 pour faire le tour des villages en prêchant l’hygiène et les mille et une manières de faire cuire un œuf !

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Voilà enfin la petite tante dont nous avons tellement entendu parler!Quel voyage mes amis...Je ne sais pas si vous recevez tous mes commentaires mais je blog tous les jours et je suis en émerveillement devant les photos et tout ce que vous accomplissez quotidiennement....Quelle émotion chaque fois,bravo bravo,ces familles et tous ces enfants si heureux avec vous!!
Baisers baisers
LaurenceP